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AERODROME MITRY-COMPANS PENDANT LA GUERRE DE 1914-1918

LES ESCADRILLES AYANT SEJOURNE A MITRY EN 1914-1918.

LEUR TERRAIN:

Le 6 septembre 1914, au début de la première bataille de la Marne, on signale des avions sur un terrain qui est noté comme étant situé à "Compans-la-Ville" (photo ne datant pas de 1914, car on n'en a pas trouvée). En réalité, il s'agit certainement d'un espace situé à cheval sur la limite entre Mitry-Mory et Compans, dans l'angle formé par les routes D 212 (claye Souilly-Le Mesnil Amelot) et D 9 (Mitry-Mory-Compans). On peut penser que c'est le même emplacement qui été utilisé en juin 1918, cet endroit possède les qualités exigées d'un terrain d'aviation: surface plane, pas d'arbres ou de construction en hauteur sur 1000 m au moins dans tout les sens et proximité de deux routes offrant un accès facile aux nombreux camions transportant le matériel au moment de l'installation  (l'échelon terrestre) et par la suite pour l'approvisionnement en essence, munitions, pièces de rechange indispensables aux petites réparations, ravitaillement. Une escadrille emploie pour ses transports une douzaine de camions lourds et de remorques, pour ses liaisons, des voitures légères et des motos. La proximité de Mitry et de Mory d'une part, de Compans de l'autre offre des possibilités de raccordement au réseau téléphonique pour la communication avec les autres escadrilles et les divers niveaux du commandement.

A cet emplacement sera installé, juste avant la seconde guerre mondiale, l'aérodrome de Mitry- Compans, encore appelé par les militaires " base aérienne de Claye-Souilly ", aujourd'hui intégré dans l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle. 

 

LEURS APPAREILS:

L'avion qui équipe, depuis décembre 1917, les escadrilles en séjour à Mitry, est le SPAD XIII qui apparaît sur le front en 1917. Selon les spécialistes de l'aéronautique c'est le " meilleur chasseur de la guerre " en 1918 la presque totalité de la chasse française en remplacement de son prédécesseur le SPAD VII, lui-même ayant succédé au Nieuport. C'est un monoplace qui a été utilisé par un bon nombre " d'as " tels Guynemer, Fonck et l'américain Rickenbacker. Equipé d'un moteur Hispano-Suiza de 220 chevaux, il est robuste, maniable et rapide.

Il est facile à construire: 8472 exemplaires ont été fabriqués durant la guerre et il sera en service jusqu'en 1923. Sa vitesse maximum est de 215 Km/h et son autonomie de vol d'environ deux heures, la durée de ses missions, surtout des patrouilles de surveillance, dépasse rarement 1h 15, elles sont en général de 45 à 60 mn. son envergure 8,04 m- longueur 6,30m - poids 820kg - armement deux mitrailleuses, comme on peu le voir sur cette photo ci-contre.

Il a existé aussi un modèle voisin , le SPAD XII équipé d'un canon Puteaux de 37 mm, également utilisé sur les chars Renault FT, qui sort au milieu de l'hélice et d'une mitrailleuse. Sa vitesse maximale est de 203 km/h et son premier vol le 5 juillet 1917.

Il ne restera que très peu en service, peu apprécier des pilotes.

Sur ce schéma, on voie la position du pilote, le canon de 37 mm juste au dessus des genoux et la mitrailleuse en haut.

LES ESCADRILLES:

Chaque escadrille est désignée par un sigle de deux ou trois lettres qui désigne le type de ses appareils suivi d'un nombre qui lui est propre, compris entre 1 et 300 pour les escadrilles du front français, attribué au fur et à mesure de leur création. Celles qui ont séjourné à Mitry sont la SPA 37, la SPA  81 et la SPA 97 qui forment le GC 15 avec la SPA 93 qui elle se trouve pendant la même période sur un autre terrain, à Silly-le-long ( dans l'Oise, près du Plessis-Belleville ).

Chacune d'elles compte de 12 à 15 appareils, en principe 15, c'est variable, car il y a ceux qui sont indisponibles et ceux qui ne sont pas rentrés d'une mission. Pour les mener 15 pilotes sont prévus, il y a parfois des manquants qui n'ont pas été remplacés. Ce matériel volant demande un entretien important qui est assuré par une quarantaine de mécaniciens. Au total l'escadrille compte un peu plus de cent hommes, commandée par un capitaine, elle est l'équivalent d'une compagnie d'infanterie. Ce sont donc plus de trois cents soldats qui ont cantonné sur le terrain de Mitry pendant une semaine.

Chacune d'elles porte sur les côtés du fuselage de ses appareils un dessin symbolique librement choisi évoquant souvent la chasse, des oiseaux, c'est la première idée qui vient à l'esprit lorsqu'on voit un avion, plus particulièrement des oiseaux de proie. Les trois escadrilles qui ont séjourné à Mitry ont fait des choix allant dans ce sens.

L'escadrille SPA 37 - un condor en vol aile noires, un corps rouge ) cherchant sa proie.

L'escadrille SPA 81 - Un lévrier blanc poursuivant un lièvre porteur d'une croix de fer.

L'escadrille SPA 97 - un fanion rouge et blanc à deux hermines noires.

( extrait de " Les escadrilles de l'aéronautique militaire française, Symbolique et Histoire 1912-1920 )

Il n'existe pas aux Archives de l'Armée de l'Air, pour la Grande Guerre, le genre de registres qu'on trouve pour l'infanterie ( les journaux de marche et d'opération ) récapitulant les différents combats auxquels l'unité a participé, cependant " les carnets de comptabilité en campagne " montrent que les trois escadrilles ont été présentent à Verdun et en Champagne. A partir du 29 mars 1918 elles arrivent au plessis-Belleville pour une quinzaine de jours. La chasse participe en nombre aux opérations terrestres le 21 mars, quand les allemands enfoncent le front entre Roye et Montdidier, en attendant le regroupement des forces françaises malmenées, l'aviation dont le GC 15 avec ses 4 escadrilles, tente de ralentir la progression ennemi en  pratiquant le mitraillage des troupes au sol. Le 28 mai, les trois escadrilles font mouvement à Rarey, elles participent aux combats sur l'Aisne et le Matz. Le 2 juin elles reviennent sur le terrain du Plessis-Belleville et le 6 juin c'est le départ pour Mitry, car le Terrain du Plessis vient d'être bombardé . Bombardement au cours duquel le commandant de l'escadrille SPA 37 ( le capitaine Paumier) a été tué. Cette escadrille arrive à Mitry sans commandant.

La SPA 37 et la SPA 97 Quittent Mitry le 14 juin 1918 mais n'abandonnent pas la région, elles se posent à Roissy-en-France où elles retrouvent la SPA 93 et la SPA 81 partie de Mitry la veille. Elles se trouveront près de Toul, au moment de l'armistice du 11 novembre.

A la fin de la guerre l'escadrille SPA 37 compte 50 victoires aériennes homologuées, l'attribution de la croix de guerre avec palme de bronze, la SPA 81 88 victoires , la croix de guerre avec deux palmes de bronze, la SPA 97 25 victoires  et deux citations. Ensemble elles ont perdu 28 pilotes morts ou disparus au combat.

Le terrain de Mitry recevra à nouveau des avions, mais en 1940, une autre guerre, une autre histoire.

Je me suis inspiré de l'étude faîte par Monsieur Crapart (qui était membre de l'APM) pour vous réécrire ce nouveau texte beaucoup plus détaillés.

 

Jacques Devignat

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MITRY - MORY ET LA PREMIERE GUERRE MONDIALE

NOUS ALLONS BIENTÔT FÊTER LE CENTENAIRE DE LA FIN DE LA PREMIERE GUERRE MONDIALE.

Afin de bien s'entendre sur le Mitry-Mory dont je vais vous entretenir, revoyons la carte du territoire de notre commune à la première guerre mondiale. Il faut surtout se souvenir que la zone urbaine de Mitry-le-Neuf n'existait pas. Seuls existait le Bourg, la Villette-aux-Aulnes et Mory. Bien se souvenir aussi que la gare de Mitry-Claye n'était qu'une station à deux voies, totalement isolée au milieu de la plaine, autour d'elle des champs de blé, des champs de betteraves, à perte de vue.

Quels ques soient les livres de récits historiques traitant de la première guerre mondiale que l'on consulte, on n'y trouve pratiquement aucune trace de Mitry-Mory. Ne s'y est-il donc rien passé? Effectivement aucun  " fait historique " ne s'y est apparemment déroulé. La vie du village a pourtant été grandement perturbée. Nous en voulons pour preuves deux sources de témoignages : la mémoire collective, anciens, enfants de l'époque racontent volontiers leurs souvenirs, et la correspondance des cartes postales anciennes dont soixante-quinze pour cent de celles des années 1914 à 1918 émanent de soldats de passage dans notre ville.

Le 3 août 1914, l'Allemagne déclare la guerre à la France. Lucien Legrand Mytrien alors âgé de 9 ans et demi, était parti chercher le lait pour sa maman et c'est à la ferme Rayer qu'il entendit le tocsin annoncer la terrible nouvelle. Ce fait l'a tant marqué qu'il n'a jamais pu en chasser le souvenir. La mobilisation générale, dont l'ordre était affiché depuis quelques jours déjà, avait provoqué le départ d'un grand nombre de jeunes hommes et de moins jeunes des fermes de Mitry-Mory. L'Abbé Didier lui même avait rejoint, comme auxiliaire, l'hôpital de Mary-sur-Marne. Puis c'est la violation de la Belgique, les allemands traversent la Meuse, arrivent sur la Somme, foncent sur Paris. Devant l'invasion, les habitants des zones menacées fuient. Vers la mi-août, Mitry, lui aussi se vide. Des témoins racontent : " nous décidons de rejoindre Paris afin d'y trouver un train en partance pour la Bretagne où nous avons de la famille. Il avait été conseillé à la population de laisser les portes des maisons ouvertes, ce que nous faisons. Mais arrivés à Sevran nous faisons demi tour pour fermer la maison. Arrivés Place de la République, nous rencontrons un groupe de soldats qui nous interdit d'aller plus loin : l'arrivée des allemands est imminente. Nous attendons la nuit et nous allons jusqu'au ( bout d'en haut ) fermer notre maison  (place de l'Eglise), puis nous repartons ".

D'après certaines sources, des éclaireurs allemands auraient poussé jusqu'à Claye, voire voire même jusqu'à Mitry. Les troupes n'atteindront pas notre commune. Elles ont envahi la vallée de la Thérouane et les campagnes de l'Ourcq. Elles sont à Saint Soupplets, Marcilly, Etrepilly, Monthyon, Barcy, Chambry, Varredes, Penchard c'est à dire à 10, 12, 15 km de Mitry. C'est alors que le général Joffre décide d'attaquer le flanc droit de l'armée de Von Kluck. L'offensive a lieu le 6 septembre 1914 au matin. La 6 éme armée du général Maunoury dont les troupes étaient groupées autour du château de Thieux, le 231 éme R I cantonné à Nantouillet et à Thieux, engagent le combat le 6 à 6 heures du matin de Nantouillet. Le bataillon lancé à l'attaque sans préparation suffisante de l'artillerie vit sa marche en avant bientôt brisée. Les capitaines Guérin et Huguin, les lieutenants de la Cornillère et Charles Péguy furent tués (journal de Marche du 276 e R I, Archives de l'armée de terre à Vincennes ), le 246 e RI se retrouve à Moussy-le-Neuf le trois septembre. C'est à dire combien cette première bataille de la Marne se déroule à proximité de Mitry.

Les " taxis de la Marne " inspectés avant leur départ sur la place de la Mairie de Tremblay, ne traverseront pas Mitry. Par contre, s'ils permettront aux 4000 soldats de la 7 ème division d'infanterie d'être acheminés sur le front du combat à Nanteuil-le-Haudouin, ils ne suffiront évidemment pas à transporter tous les renforts nécessaires et le réseau ferré en place, entre autres, a été aussi d'un grand secours. La ligne Paris-Mitry-Claye Saint-Mard, Nanteuil-le-Haudouin desservait le champ de bataille. Elle était aussi empruntée par les trains sanitaires qui ramenaient les blessés vers les hôpitaux parisiens. Lorsqu'en gare de Mitry-Claye certains étaient déjà décédés, on les évacuait et les enterrait, pour un temps, dans un petit cimetière d'une dizaine de tombes installé en face de la gare de Mitry-Claye (emplacement de l'actuel parking).

 

L'orphelinat des Sœurs de Saint-Vincent -de-Paul (26 rue Paul-Vaillant-Couturier, ancienne rue de Paris) est transformé en hôpital " Hôpital Bénévole Volontaire N° 20 Bis - 40 lits (les dates de son fonctionnement du 3 août 1914 au 30 décembre 1918). Ont peut y voir sur cette carte postale le drapeau Croix-Rouge et des soldats blessés ou convalescents, ainsi que les trois sœurs.

Petite parenthèse ( c'est l'à qu'à soignée les blessés, Madeleine la petite infirmière de la Croix-Rouge en 1914, dont je parle dans la présentation du livre "Silences en forêt" de Marie-France Clerc.

La bataille de la Marne stoppera l'avance allemande . A partir du 17 septembre, des Vosges à Soissons, s'installe la ligne de front. La guerre des tranchées commence. Il semble qu'alors Mitry-Mory serve de base-arrière. Les grands axes routiers, route de Compans, route de la Villette-aux-Aulnes sont bordés de tranchées; beaucoup de soldats cantonneront à Mitry, les uns attendant de monter au front, les autre en redescendant pour quelques temps de repos.

Ont voient sur cette photo les troupes américaines de passage à Mitry en 1917 au repos devant l'église Saint-Martin du bourg.

Quelles sont les troupes qui "cantonnent" à Mitry?

Ce qui frappe, en premier lieu, c'est que la plupart de ces troupes sont des "territoriales". L'armée comprenait alors des troupes d'actives (2 ans), la réserve d'actives (11ans) et l'armée dite territoriale. Les " territoriaux" sont donc des hommes âgés de plus de trente-trois ans. C'est ainsi que l'on retrouve à Mitry des hommes du 87 ème territorial qui vient de Brest (il y séjourne du 24 août au 12 septembre 1914) Le 3 octobre le 69 ème RTI , la 1er et 2 ème compagnies de son 1er bataillon séjournent à Mitry soit 959 hommes, 14 chevaux et 12 mulets de bâts, et 3 sections de mitrailleurs.

A Mitry cantonnement aussi des troupes de régiments d'artillerie lourde (1915-1916-1917) et du génie (que je vous en parlerait plus loin). De nombreux cachets rond apposés sur diverses cartes nous apprennent qu'un poste de DCA était installé à Mitry-Mory, comme ont peut le voir sur cette carte postale ancienne.

Enfin, en gare de Mitry-Claye, une section de garde-voies de communication cantonnait en permanence.

Le journal de marche du 87 ème territorial Breton.

j'ai recherché les journaux de marche de ces différents régiments afin de retrouver leur passage à Mitry. Celui du 87 ème RIT est une œuvre lyrique et je ne résiste pas à l'envie d'en recopier quelques lignes. 26 août 1914: Embarquement en gare de Brest pour Paris-Batignoles. 26 août : La 1er section du 4 ème bataillon et l'Etat Major du Régiment sont dirigés sur Mitry. " La marche de 28 km environ s'est faite sans un seul traînard malgré les routes pavées si dures pour les meilleurs marcheurs. Alors commence" pour le régiment la lugubre corvée de l'ensevelissement de ces pauvres morts. Cette bataille de la Marne a été terrible. Et ces ruines et maisons ainsi que ces fermes incendiées. Le 17 septembre : cependant les habitants rentrent peu à peu mais timidement, ramenant leurs attelages de grands bœufs et leurs troupeaux de moutons.

Que contiennent les correspondances de soldats? (d'après les cartes postales).

Peu de renseignements stratégiques, bien entendu, mais des indications sur leurs déplacements et leurs occupations. le 29.09.1914: " Nous voilà à Mitry, sur la Seine-et-Marne, pour défendre les forts de Paris ". le 18.08.1916: " Aujourd'hui viennent d'arriver trois compagnies de territoriaux, ils se trouvaient dans la Somme, ils travaillent constamment de nuit ". Le 5.12.1916: " En ce moment nous faisons du boulot de terrassement mais nous allons bientôt faire de la pose de voie (2er compagnie du 5 ème génie) ".

On y trouve encore des aperçus sur leurs conditions de vie. Les troupes étaient hébergées dans les fermes, dans les granges ou chez le particulier. le 9.12.1914: "Ici (à Mory), nous sommes dans les granges, empilés comme des harengs". Le 10.01.1915: "Après 18 km sac au dos depuis 4h du matin nous voilà consignés ici (à Mitry) et obligés d'écrire comme on peut sur les genoux". le 31.07.1918: " Nous voilà installés à Mitry, le pays est plaisant mais la nourriture nous a déçus, faible ration et rien de fameux. Le cantonnement manque de confort ".

Les sous-officiers des compagnies au repos avaient installé leur "popote" chez Cagnon (entrepreneur de maçonnerie). Le cuisinier et son aide faisaient la cuisine dans la buanderie et servaient dans la salle à manger familiale. Mais ces correspondances rappellent sans cesse que cette "chair à canon" reste avant tout des hommes qui s'ennuient de chez eux et attendent la "perme", sujet de nombreuses cartes qui rassurent les leurs: " le suis en bonne santé ", " ne vous faites pas de sang pour moi ", qui réclament lettres et colis: " j'attends toujours mes   ", qui s'inquiètent pour ceux qu'ils ont laissés. Enfin tout au long de ces quatre ans (et quelle période) de cartes postales, on voit évoluer le sentiment de ces hommes face à la guerre. 

En 1914, la gare de Mitry-Claye était une station sur la ligne Paris-Soissons-Laon, désservie par deux voies: l'une allant à Paris, l'autre en venant. A sa hauteur, deux quais bordaient ces voies qui étaient traversée par un passage. Cette ligne de chemin de fer enjambait le chemin de grande communication n°139 qui reliait Mitry et Mory soit à Gressy, soit à Claye-Souilly, par un pont de pierre en forme d'arche. De part et d'autre de la route, la ligne des crétes des talus plantés d'acacias, aboutissaient au niveau des rails. La gare de Mitry-Claye fut choisie, sans doute à cause de sa proximité du front, pour devenir un garage et un nœud ferroviaire aux trains de matériel et de munitions d'artillerie de campagne et d'artillerie lourde. Le capitaine de la 2 ème compagnie du 5 ème régiment du génie fut chargé de la direction des travaux d'aménagement de la gare. Il aura encore à sa disposition les effectifs des compagnies B/20 et B/5 ainsi que de la 107 ème compagnie de ce même régiment, ceux d'un bataillon du 342 ème RIT d'une compagnie de Travailleurs auxiliaires et d'une compagnie d'Anamites ; officiers et gradés de la 2ème compagnie sont chargés de l'encadrement de tout ce personnel.

Ces travaux durèrent, y compris le temps d'études, du 1 août 1916 au 11 juin 1917. Très important, ils comprirent, tout d'abord, l'installation, le long des voies de la gare de 4 faisceaux de voies supplémentaires, destinés, l'un à la réception des rames, les deux autres au garage des rames de munitions et d'artillerie et le quatrième à la formation des rames à expédier vers l'avant. A cette installation vint se joindre un autre faisceau destiné au garage des wagons rempli de grenades ainsi qu'une voie desservant 4 magasins à grenades. De plus, on construisit sur le plateau de Mitry-Compans, des installations d'artillerie comprenant 6 hangars desservis par des voies reliées aux faisceaux déjà cités (emplacement de l'actuelle zone industrielle).

Les premiers terrassements nécessaires à l'établissement des plates-formes de voies débutèrent le 17 août 1916 et se terminèrent le 15 avril 1917. La pose des voies définitives fut achevée le 7 juin 1917. 1700m de quais spéciaux furent aménagés ainsi que 240m de mur de quai pour les magasins à grenades. Deux dispositifs de secours d'incendie furent construits: le premier destiné aux faisceaux de voies, le second, aux hangars de dépôt. Ils nécessitèrent 4 mois et demi de travaux. l'ensemble des installations fut doté d'un éclairage électrique. Le second était produit sur place par une usine électrique établie par la Compagnie du Nord. Pour transformer notre paisible gare de voyageurs en place forte d'artillerie lourde, force avait été d'en modifier les accès. Pour assurer l'entrée, du côté Paris, du faisceau d'arrivée des rames, il fallut construire, contre le pont primitif un autre pont que l'on fit reposer sur des culées de béton  avec parement de briques. Ce travail commencé le 30 août 1916 s'acheva le 1er octobre  et le pont fut essayé le 11 octobre. Par l'autre extrémité, côté Soissons, par suite de l'élargissement de la tranchée qu'enjambait le " Pont Royal " il fallut allonger ce pont afin qu'il pût atteindre le bord reculé de la tranchée. Cela fut réalisé en béton armé reposant sur 4 murs de briques. Le pont fut à nouveau livré à la circulation le 3 décembre 1916. Ces travaux entraînèrent un réaménagement de la gare: déplacement des fils télégraphiques, installation d'une nouvelle station de pompage, réalisation de tout un nouveau programme de signalisation de la gare, détournement du chemin latéral aux voies (actuelle rue jean Caille).

Autour du Pont-Royal furent dressés les baraquements pour loger le personnel du Poste, les baraquements-bureaux des services de la Compagnie du Nord.

Témoignage: le 22 mars 1917 " Me voilà dans la Seine et Marne je te dirait que nous sommes encore loin des lignes de feux. Noud sommes avec les vieux des classes 90, mais comme travail c'est dur, on fait du terrassement et déblaiement des voies. Enfin d'ici quelques jours nous allons à Soissons, ça sera encore plus dur ". (Extrait de correspondance sur carte postale).

Explosion du dépôt de munition: Le 26 juillet 1917, en fin d'après-midi, une explosion de  moyenne intensité éclata. Portes et vitres tremblèrent. L'événement causa à la population une frayeur qui fut vite réfrénée. Un des hangars du camp avait sauté! Vers 22 heures, une seconde explosion, de très forte intensité, retentit. Le souffle fit voler les vitres en éclats, arracha ou bloqua les portes des habitations, endommagea les toitures. La nuit était noire et les mitryens, affolés, fuirent dans les rues ou descendirent dans les caves. Les quelques témoins qui ont racontés ces scènes en vibraient encore. Le dépôt entier s'était volatilisé. Sur les causes de ces explosions, les gens jasèrent. Mais aucun document  furent trouvé sur ce qui s'est passé.

Cet incident n'empêcha pas que les installations durèrent au moins jusqu'en août 1920. A cette date, en effet on délibère, en séance de conseil municipal, sur la nécessité de demander au ministre de la guerre de supprimer dans les plus brefs délais les dépôts de munitions du plateau Mitry-Compans, invoquant la menace permanente qu'ils constituent et l'occupation stérile " de dizaines d'hectares de terre des meilleurs de France ". A cette époque, on avait encore le respect de la terre.

Outre les dégâts commis chez les particuliers, ceux des bâtiments communaux ne furent pas moindre. Les carreaux de la mairie, des écoles, de la salle des fêtes durent être remplacés. La toiture de l'église Saint Martin fut à refaire, mais la plus grande perte fut les vitraux de l'église. 

à gauche le vitrail de l'annonciation qui fut endommagé par l'explosion de 1917, ont le découvre après sa restauration.

Les vitraux de l'église Saint-Martin:

Les vitraux de l'église Saint-Martin étaient presque neufs. Quelques-uns  dataient des dernières années du XIX e siècle, les autres de 1902 ou 1903. Le montant de la facture de la maison Haussaire de Paris du 23 septembre 1903, s'élevait à 900F sur lequel l'Abbé Meakes alors curé de Mitry, avait versé 400Fdéjà. Il s'agissait de la fourniture de huit fenêtres en mosaïque de couleur pour la haute nef de l'église. Les autres avaient été offerts par la population, les fabriciens ou quelques familles de notables.

Ce furent surtout les vitraux du mur du chevet qui subirent les plus grands dommages, lors de cette série d'explosions. Ce sera la maison Haussaire qui les restaurera. Pour ce faire, les fenêtres sont entièrement déposées et réparées en atelier. Le 11octobre 1922, le grand vitrail du calvaire, don de Madame TARTIER, est remis en place au-dessus du maître-autel; les 5 et 7 mars 1923, celui de l'annonciation, don de la famille MERLE, et celui de la Visitation sont reposés, et ainsi de suite jusqu'au 5 février 1924, date de la fin des travaux. Les vitraux des collatéraux, moins endommagés, furent réparés plus rapidement.

Les travaux furent payés par la commune au moyen des fonds versés par l'état en réparation des dommages de guerre. Ils avaient été évalués, lors de déclarations, à 15 720F; la couverture de l'église à 12 589F; les carreaux des autres bâtiments communaux à 710F environ. Les indemnités ont été perçues le 15 novembre 1921 réduites d'environ 7% du montant déclaré.  

Autres traces du passage de la guerre:  Les 135 tilleuls de l'avenue de la gare, détruits par l'armée en 1914 sont à remplacer, ce sera fait en novembre 1922; 34 peupliers au petit Vivier et 6 ormeaux au chemin des Vaches ont disparu; des tranchées existent encore en 1921 sur le chemin de la Villette à Tremblay, et les voitures des cultivateurs sont obligées de passer sur le bord d'un champ emblavé d'un fermier de Tremblay. Des débris de fil de fer, de barbelés et de taillis encombrent le chemin  autour des marais et le rendent impraticable. Tout doit être remis en état. Mais comment remettre en état les familles dans lesquelles ne rentrera ni le père, ni le fils? 65 pour Mitry, 65 prénoms pour 54 patronymes.

La plaque commémorative:

Dès la séance du conseil municipal du 9 septembre 1919, la pose d'une plaque commémorative, pour perpétuer la mémoire de ceux qui sont morts pour la Patrie, est décidée. La plaque de marbre fut exécuté par un marbrier de Meaux Monsieur Lelu. Elle porte en-tête " A la mémoire des enfants de Mitry-Mory, victimes de la guerre de 1914-1918 " et les noms y sont gravés. Elle fut apposée en mai 1921 sur la façade de la mairie à gauche de la porte. Depuis que celle-ci est devenue bureau de poste, elle à été transportée dans l'hôtel de Ville.

Jacques Devignat 

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